Plusieurs études le prédisent : 2/3 de la population sera urbaine en 2050. Or, nous sommes de plus en plus nombreux à reconnaître les dommages de certaines activités humaines sur la planète et plus directement sur notre santé et notre bien-être.

Ces effets affectent les éléments essentiels à la vie qui sont l’air, l’eau et la terre :

  • L’air est de plus en plus chargé en gaz à effet de serre et en particules.
  • Nous allons avoir des périodes de canicule de plus en plus longues (augmentation de 1,3°C à Paris entre 1901 et 2000 selon les chiffres diffusés par l’Agence Parisienne du Climat et Météo France en 2015), notamment dans les espaces urbanisés denses et non végétalisés, ce que nous appelons les Îlots de Chaleur Urbains.
  • Certaines régions de France sont déjà soumises à des périodes inédites de sécheresse quelle que soit la saison.
  • Nos sols sont de plus en plus pollués, appauvris en éléments essentiels pour la croissance des cultures, voire inertes.
  • La biodiversité de la faune et de la flore en est fortement affectée et cette situation va encore empirer.

Notre société actuelle, consommatrice effrénée de produits manufacturés utilisant des matières premières non renouvelables, est globalement en train de s’appauvrir et de se rendre malade du travail (stress, surmenage…) et de l’usage intensif des écrans. On en oublie de regarder les prouesses de la nature alors qu’elle peut nous apporter des satisfactions personnelles et de l’apaisement.

Il faut être lucide : la colonisation de Mars ne nous permettra pas de reproduire cette richesse. L’homme ne peut vivre sereinement sans la nature. Le mal-être ressenti par de plus en plus de citadins est en partie lié à un manque de verdure.

  

Par des gestes accessibles à tout le monde 

Des solutions simples pour contribuer à ralentir ces bouleversements sont pourtant à notre portée, quels que soient nos moyens, et nous avons très peu de temps pour contrer ce processus irréversible.

Parmi les écogestes, il y a celui qui consiste à planter tout simplement des graines, là où nous manquons de verdure.

Mettre des ruches sur les toits, c’est bien, mais encore faut-il qu’il y ait assez de fleurs pour toutes les butineuses, pas seulement les abeilles domestiques. Certaines municipalités ont bien mesuré cette nécessité de mettre un peu plus de nature en ville et incitent notamment leurs concitoyens à venir chercher des graines et à végétaliser des espaces publics ciblés.

Changeons notre regard sur les espaces colonisés naturellement par des herbes qu’il vaudrait mieux effectivement appeler adventices ou herbes folles (terme récemment proposé par les botanistes de Tela Botanica), plutôt que « mauvaises herbes ». Ces herbes sont pleines de ressources, peuvent même être comestibles et poussent quelques fois dans des conditions extrêmes. Nous pouvons, par nos actions, cultiver des plantes comestibles localement (pas au bord de zones de forte circulation) et en bénéficier ensuite dans nos assiettes. Il n’y a pas plus court comme circuit, c’est valorisant et cela fait du bien au moral.

  

Par le développement à plus grande échelle de cultures comestibles (ou pas) en ville

Le développement de l’agriculture urbaine – que je préfère personnellement appeler urbiculture, car il ne s’agit pas de véritables champs – reflète bien cette appétence croissante pour des produits sains, locaux et pour ce retour à la terre avec une approche permaculturelle. Prendre soin de la terre et de ces cultures, ces jardins ou autres espaces végétalisés, auparavant imperméables, rend bien des services écosystémiques et permet en même temps de prendre soin de nous, car cette démarche contribue à rafraîchir l’air en été, à limiter les inondations avec l’engorgement du réseau de traitement des eaux en périodes de fortes pluies, à développer une bio-économie locale, à créer du lien social et bien d’autres bénéfices.

De plus en plus de villes incitent à la végétalisation des toitures mais les modèles économiques de l’urbiculture ne peuvent pas se limiter à la production de fruits et légumes. Les parcelles sont trop petites. D’autres activités doivent être menées en parallèle pour en vivre décemment. Une solution possible serait de valoriser les autres services écosystémiques rendus à la communauté. Vaste sujet d’étude pour chiffrer ces bénéfices… mais pourtant il faudra bien s’y atteler à court ou moyen terme pour maintenir et développer cette approche, car les toits plats végétalisables ne manquent pas, alors que nous perdons l’équivalent d’un département en terres agricoles tous les 10 ans.

Pour mieux supporter les périodes de canicule en ville, la nouvelle Réglementation Environnementale 2020 (RE2020), qui va remplacer la Réglementation Thermique 2012, va imposer aux nouvelles constructions la prise en compte de la présence du végétal sur la parcelle.

Autre point, qui devrait être pris en compte dans cette réglementation : le stockage du carbone biogénique (produit par des organismes vivants). Ce serait une réelle avancée, car n’oublions pas qu’en contribuant à végétaliser nos espaces de vie et de travail, nous captons par photosynthèse le carbone du gaz carbonique de l’air, ce fameux gaz à effet de serre, cause de la plupart de nos maux climatiques.

 

Par l’amélioration des performances thermiques de nos bâtiments avec des matériaux durables

Une autre action possible contribuant à stocker ce carbone biogénique est l’utilisation de panneaux biosourcés, c’est-à-dire comportant des végétaux comme le lin, le chanvre, l’herbe de prairies, pour l’isolation thermique des bâtiments énergivores. Le bois est le matériau le plus utilisé à ce jour en France et son usage se développe significativement, notre pays étant bien pourvu en massifs forestiers, qui continuent à croître. Ne vaut-il pas mieux s’isoler avec du bois plutôt que de le brûler dans des passoires énergétiques ? De plus, quand on sait que les arbres sont généralement coupés au-delà de 25 ans de croissance, stocker cette matière dans des bâtiments pendant au moins 50 ans est un juste retour de l’investissement. Le brûler ne dure que quelques heures et le carbone se volatilise dans l’atmosphère en gaz carbonique.

Les cultures de chanvre et de lin, voire de miscanthus se développent de plus en plus en France et ont l’avantage de requérir très peu d’intrants chimiques et d’améliorer la qualité du sol. Le miscanthus, en particulier l’espèce dite « herbe à éléphant », est intéressant car davantage de biomasse est produite à l’hectare, compte tenu de la hauteur atteinte par ses tiges. De plus, leurs rhizomes sont utilisables pendant plusieurs années sans amendement au-delà de la première année. Une culture à développer sur les terres polluées pour le secteur du bâtiment ? Nous n’en sommes qu’au début de cette application…

D’autres ressources végétales comme la paille de céréales sont aussi utilisées ou en cours de développement comme la paille de riz, de colza. L’élevage des animaux pour la viande étant en décroissance en France, c’est un gisement intéressant à considérer pour stocker du carbone pendant de longues années. Là aussi, il faudrait penser à rémunérer les cultivateurs ruraux pour ce service…

  

Pour stocker durablement du carbone issu du gaz carbonique atmosphérique et le valoriser sous la forme d’une compensation de notre empreinte carbone

Ces deux approches, végétalisation et isolation thermique avec des matériaux biosourcés, permettent de stocker du carbone biogénique avec une faible consommation en énergie grise comparativement aux matériaux conventionnels et avec un faible coût par rapport à celui des solutions High Tech pour piéger le CO2, notamment en sortie de cheminées d’usines.

Espérons que les discussions en cours sur la RE2020 aboutiront à une prise en compte de cet indicateur et par la suite à une valorisation de la quantité de carbone stockée sur un marché de la compensation carbone locale à développer, pour motiver davantage de professionnels du BTP à utiliser ces matériaux et les maîtres d’ouvrage à les exiger…